L’agriculture est la principale activité économique des zones rurales camerounaises en général et de l’arrondissement de Nkondjock en particulier. Les pratiques agricoles qui s’opèrent sur le milieu physique en l’occurrence le sol impactent la dynamique des paysages ruraux. L’objectif de la présente contribution se propose d’analyser l’influence de l’évolution des systèmes culturaux sur la dynamique des paysages à Nkondjock. L’approche méthodologique est focalisée sur la recherche documentaire, les observations de terrain couplées de l’analyse des cartes d’occupation du sol des années 1975, 1986 et 2019, les entretiens avec les personnes ressources et les enquêtes socio-économiques auprès des producteurs ruraux. Les enquêtes socio-économiques dans les 15 principaux bassins de production agricole de la localité ont touché 186 ménages agricoles choisis de façon aléatoire. Les résultats de l’étude indiquent que les changements des systèmes culturaux sont responsables des transformations observées dans le paysage. L’analyse diachronique des cartes d’occupation des sols montre qu’avant l’arrivée des pionniers, la forêt représentait 81,90% de l’espace total de Nkondjock, de nos jours, elle régresse en faveur des activités agricoles. Ainsi, l’on constate qu’entre 1975 et 1986, la forêt a régressé de 25,54% et de 17,6% entre 1986 et 2019. Cette régression des surfaces forestières influe sur la dynamique des paysages et est source de nombreuses conséquences dont la recherche des solutions nécessite la conscientisation et l’implication de tous les acteurs.
Agriculture is the main economic activity of Cameroonian rural areas in general and of the district of Nkondjock in particular. Agricultural practices that operate on the physical environment, in this case the soil. The objective of this contribution proposes to analyze the influence of the evolution of land use systems on the dynamics of landscapes in Nkondjock. The methodological approach is focused on documentary research, field observations coupled with the analysis of land use maps for the years 1975, 1986 and 2019, interviews with resource persons and socio-economic surveys with producers. rural. The socio-economic surveys in the 15 main agricultural production basins of the locality affected 186 agricultural households chosen at random. The results of the study indicate that human activities for the establishment of crops are responsible for landscape transformations due to changes in land use systems. The diachronic analysis of land use maps shows that before the arrival of the pioneers, the forest represented 81.90% of the total space, nowadays it is regressing in favor of other agricultural activities. It can be seen that between 1975 and 1986, the forest regressed by 25.54% and by 17.6% between 1986 and 2019. This regression of forest areas influences the dynamics of landscapes and is the source of many consequences, including research solutions requires the awareness and involvement of all stakeholders.
Introduction
Avec l’accroissement continu et rapide de la population en Afrique subsaharienne, et les multiples crises (économiques, sociales et climatiques) qu’a connue cette partie du continent au cours des vingt-cinq dernières années, les questions d’intensification de l’agriculture et de la protection de l’environnement sont au cœur des préoccupations de développement (Milleville et Serpantié, 1994). En 2000 par exemple, le Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique (NEPAD) constate que la production agricole a augmenté de façon soutenue. Cette croissance s’est faite principalement par l’expansion des surfaces cultivées et par l’utilisation d’une main d’œuvre agricole plus abondante, ce qui aura conduit à une relative augmentation des rendements (NEPAD, 2000). Les théories socio-économiques qui prennent en compte les paramètres démographiques et fonciers se trouvent en conséquence très sollicitées pour expliquer les mutations en cours dans les zones rurales.
Au Cameroun, l’agriculture qui représente 70% des activités en milieu rural est un secteur clé pour le développement socio-économique du pays (Bayiha et al, 2019). Les principaux bassins de production agricole de l’Arrondissement de Nkondjock sont au centre des enjeux économiques qui impactent sur la dynamique des paysages. Le paysage est soumis à des pressions anthropiques, qui prennent de l’ampleur depuis les années soixante-dix et elles se sont encore accrues en 2016 avec le début de la crise dite « anglophone[1] ». Cet espace connait des transformations rapides et irréversibles du fait de l’urbanisation et les activités de production agricole. En effet, ces mutations bouleversent la perception, la psychologie sociale et même l’esthétique du paysage. Nkondjock est ces dernières années plus que par le passé, la destination prisée de nombreuses populations venues de l’arrière-pays et des pays étrangers. Cette migration accélère le processus d’occupation du sol ainsi la destruction des milieux naturels (PCD de Nkondjock, 2012). La mise en place des infrastructures de communication ayant contribué au désenclavement des terroirs agricoles ont aussi facilité les flux migratoires entrants. Entre 1966 et 1970 la population a pratiquement quadruplé, passant de 4164 à 5319 habitants. Les résultats du 3e et dernier recensement général de la population et de l’habitat (RGPH, 2010) évaluent la population de Nkondjock à environ 17428 habitants.
Ces deux dernières décennies et depuis le lancement des travaux de construction de la centrale énergie solaire des villages Benga I, Benga II, Benga III , l’on assiste à une ruée spectaculaire des chercheurs d’emploi. Ces nouvelles populations viennent de l’arrière-pays et parfois au-delà du pays. Le statut de Nkondjock a changé en un laps de temps, non seulement du fait de cette explosion démographique, mais surtout par sa position désormais stratégique (porte d’entrée/sortie) et de son rôle de pôle économique pour son département, sa région, pour le Cameroun et la sous- région Afrique centrale. Les externalités résultantes de cette explosion démographique sont de plusieurs ordres. Elles peuvent s’exprimer en termes de pollutions, de dégradation et/ou disparition des écosystèmes naturels, extension continue des surfaces des plantations de cultures de rente, de cultures vivrières, de cultures maraichères et l’élevage. Il peut donc se poser le problème de forte dégradation du couvert végétal dû à la forte occupation de l’espace forestier par les activités agricoles. Ainsi, même si l’évolution des activités agricoles contribue au développement de la localité de Nkondjock, ils n’en demeurent pas moins qu’elles sont à l’origine de fortes conséquences à la fois sur le tissu socio-économique et sur le couvert végétal.
La présente contribution se propose d’analyser l’influence de l’évolution des systèmes culturaux sur la dynamique des paysages à Nkondjock. La méthodologie focalisée autour des enquêtes socio-économique et les observations de terrain a permis d’abord d’analyser les facteurs des mutation des changements d’utilisation des terres, ensuite décrire les caractéristiques et les manifestations de ces mutations et enfin analyser les incidences socio-économiques et écologiques de ces changements sur la dynamique des paysages.
[1] De nombreux migrants fuient la crise sécuritaire dans la partie anglophone du pays.